Qu’est-ce qu’une exposition pour un photographe ? Est-ce une consécration ? Une finalité ? Un acte de narcissisme où l’on dirait : « Regardez-moi, aimez-moi » ? C’est une question légitime, mais derrière l’idée de « s’exposer », il y a bien plus que cette simple vision.
En réalité, on ne s’expose pas comme cela, sauf si l’on a de bonnes entrées dans le milieu. Le processus est long, laborieux, et il commence bien avant le jour où une photo trouve sa place sur un mur. Tout commence par une série de questionnements : Que fais-je ? Qui suis-je ? Mes photos sont-elles exploitables ? Ont-elles un véritable intérêt ? Quel est le message que je souhaite transmettre ? Autant de doutes qui viennent ponctuer l’évolution du travail du photographe. Et, à un moment donné, la question se pose : pourquoi cette photo plutôt qu’une autre ? Pourquoi choisir celle-ci ?
Les photographies ne naissent pas d’un simple coup de tête. C’est avant tout un projet, une idée, une envie de raconter une histoire, mais une histoire dont on ignore l’intrigue. Le photographe est le narrateur, mais souvent, il ne connaît même pas encore lui-même quel récit il va dévoiler. Ce qu’il sait, c’est que son regard et ses émotions vont devenir le fil conducteur de cette narration. À qui cela va-t-il parler, au juste ? À quel public s’adresse cette image ?
Les heures passent, les kilomètres défilent, mais tout cela reste invisible aux yeux de ceux qui ne voient que le résultat final. Le photographe passe des soirées à chercher, à lire, à se documenter sur un sujet. Des semaines, des mois, voire des années peuvent s’écouler entre la première photo prise et la dernière qui sera accrochée dans une galerie. Ce processus est marqué par des moments de joie, d’excitation, mais aussi de doutes, de pleurs et même des envies de tout abandonner. Pourtant, au fil du temps, une certitude émerge : un fil se crée, l’histoire prend forme. Chaque élément du projet, chaque personnage, chaque décor s’imbrique pour créer un tout cohérent, comme un puzzle.
Puis arrive le moment où tout se concrétise. Le travail est imprimé, encadré. Le photographe voit son œuvre prendre vie. Il la partage, il l’écrit, et rencontre des gens qui, eux aussi, vont participer à cette histoire. Le travail trouve enfin son espace, ses murs blancs où il peut se raconter. Et là, on parle d’exposition. Ce n’est pas juste une question de montrer des images, c’est l’aboutissement d’une réflexion, d’un cheminement. On expose ses rêves, ses doutes, ses espoirs.
Le premier accrochage, puis le deuxième, et enfin, quinze photos plus tard, l’histoire se révèle. C’est un peu comme un enfant devant le sapin de Noël : des étoiles plein les yeux, le cœur qui bat la chamade, et une angoisse terrible : « Est-ce que cela va plaire ? » Le travail du photographe, c’est ce travail de l’ombre, celui qui met en lumière son sujet et son histoire, sans chercher à se mettre lui-même au centre de l’attention. Alors non, ce n’est pas de la vanité. Ce n’est pas de l’arrogance. C’est la conviction que son travail mérite d’être vu, qu’il a quelque chose à dire, quelque chose à partager.
Et même si parfois on peut avoir l’impression que la chance a joué son rôle, on sait aussi que c’est grâce à la bienveillance de ceux qui nous ont accueillis que ce rêve a pu se réaliser. Une première exposition n’est pas rien. C’est sans doute la plus importante de toutes. C’est elle qui marque le début d’un parcours, qui nous permet de franchir un cap et d’enfin sortir du doute. Et alors, on remercie ceux qui ont rendu cela possible. On remercie les personnes qui nous ont permis de croire en nous, en notre travail, et qui nous ont donné cette vague de compliments à laquelle on ne s’attendait pas, mais qu’on espérait secrètement.
Aujourd’hui, une nouvelle histoire s’écrit.
Merci
