La photographie en voyage
Pourquoi voyage-t-on ? Qu’attendons-nous vraiment de ces départs vers l’inconnu ? Loin des vacances farniente au bord d’une piscine à siroter un cocktail, le voyage est une expérience qui nous pousse à sortir de notre zone de confort, à questionner nos habitudes et à nous immerger pleinement dans une culture, une ville, une région.
Chaque destination choisie révèle une part de nous-mêmes. Pourquoi certains rêvent-ils des immensités sauvages de la Patagonie tandis que d’autres aspirent à la fébrilité des ruelles de Tokyo ? Nos voyages sont-ils guidés par des images vues dans les livres, les films, les récits de ceux qui nous ont précédés ? Ou bien sont-ils le reflet d’un besoin profond, presque instinctif, de retrouver une partie de nous qui sommeille ?
Voyager, c’est se perdre volontairement dans une ville inconnue, découvrir un marché local où les saveurs nous étonnent, c’est se laisser happer par une vue qui, aux yeux des locaux, n’a plus rien d’extraordinaire. Nous, les visiteurs, y voyons un éclat de paradis, tandis que ceux qui y vivent rêvent peut-être d’ailleurs. Ce croisement des perspectives est au cœur de l’expérience du voyage. Il nous fait réaliser que l’exotisme n’est qu’une question de point de vue.
Mais l’aventure commence bien avant le départ. Elle naît dans la préparation, dans le choix d’un itinéraire, dans cette excitation qui nous gagne en consultant une carte, en imaginant les lieux que nous foulerons. Chaque détail, chaque choix, chaque attente fait déjà partie du voyage.
Je voyage pour la photographie, c’est elle qui guide mes choix. Je veux de l’humain, de l’authentique, de la lumière, des visages avec des milliers d’histoires à raconter. Je veux écouter l’univers murmurer à mon cœur tous ces petits bonheurs qu’il laisse au gré de mes pas. Cette année, j’ai choisi Rome, l’Italie. Je veux entendre des voix chantantes. Le portrait de la plus ancienne femme du marché ne m’intéresse pas, je veux un cliché d’elle dans sa plus belle représentation, au milieu des étals qui ont fait chaque jour sa renommée. Je veux entrer dans un restaurant et entendre la vaisselle qui tombe, percevoir des enfants qui se cachent encore sous les jupons de leurs mères, parce qu’ils existent encore, ces petits préservés d’un monde un peu trop connecté. Je veux des clichés uniques, des moments de vie qu’on ne peut pas reproduire comme on reproduit un sourire.
Et si voyager était finalement être acteur de ses rêves ? Non pas seulement suivre un guide touristique, mais oser dévier du chemin prévu, laisser place à l’imprévu, aux rencontres, aux surprises. Car le voyage, au fond, est bien plus qu’un simple déplacement. Il est une manière de voir le monde, d’apprendre, de ressentir, de s’enrichir. N’est-ce pas là la seule chose que l’on achète et qui nous rend plus riche ?
